C’est un jour gris, l’un de ceux où le brouillard sur le lac des Quatre-Cantons est aussi épais qu’une soupe d’orge grisonne. À travers la baie vitrée, la vue sur les Alpes doit être époustouflante sous le soleil, mais aujourd’hui, dans la lumière laiteuse, on peut tout au plus deviner le sommet du Rigi et les eaux sombres du lac. Adi Herzog nous reçoit à l’étage supérieur de l’extraordinaire villa que cet expert financier a fait construire à flanc de colline dans une petite commune du lac des Quatre-Cantons. Un empilement de cubes géométriques en béton brut, d’esprit moderniste, qui côtoie villas cossues et chalets rustiques. Un manifeste cubiste de quatre étages, avec vitres panoramiques et piscine.
C’est un jour gris, l’un de ceux où le brouillard sur le lac des Quatre-Cantons est aussi épais qu’une soupe d’orge grisonne. À travers la baie vitrée, la vue sur les Alpes doit être époustouflante sous le soleil, mais aujourd’hui, dans la lumière laiteuse, on peut tout au plus deviner le sommet du Rigi et les eaux sombres du lac. Adi Herzog nous reçoit à l’étage supérieur de l’extraordinaire villa que cet expert financier a fait construire à flanc de colline dans une petite commune du lac des Quatre-Cantons. Un empilement de cubes géométriques en béton brut, d’esprit moderniste, qui côtoie villas cossues et chalets rustiques. Un manifeste cubiste de quatre étages, avec vitres panoramiques et piscine.
Rêves
Il y a des rêves d’enfance que l’on poursuit tout au long de la vie. Ils vous poussent à accomplir des choses hors du commun, et à construire pour de bon ce qui n’était autrefois que châteaux en Espagne. Adi Herzog lui aussi sait encore précisément comment tout a commencé.
Il prend un numéro jauni datant de 1969 du magazine allemand Hobby sur son étagère USM Haller, le feuillette pensivement, et finit par trouver l’article recherché : « C’est un rapport d’essai de la Porsche 911 2.0 S que j’ai lu quand j’avais 12 ans. Depuis, cette voiture ne m’est plus sortie de la tête. » À l’époque déjà, le cœur d’Adi Herzog battait pour les moteurs et la technique. Adolescent, il bricolait les mobylettes de ses amis. À 18 ans, il achète une vieille Triumph Spitfire dans une casse, la retape dans un atelier plein de courants d’air où ses doigts manquent de geler l’hiver. « C’est là que je me suis juré qu’un jour, j’aurais un garage chauffé à moi, où je pourrais réparer mes voitures sans craindre le froid. »
Au lieu de suivre un apprentissage de mécanicien, Herzog entame une carrière dans la finance et relègue la restauration d’oldtimers au rang de hobby. Avec ses premières réussites professionnelles, les voitures deviennent plus rapides et plus sportives. « Mon rêve avait toujours été d’avoir une Porsche, et à 30 ans, j’ai enfin pu m’offrir ma première 911. » Au total, Adi Herzog a possédé plus de 30 Porsche, de la 356 et des toutes premières 911 aux icônes modernes telles que la Porsche 911 Sport Classic ou la dernière 911 GT3.
Après avoir créé et revendu avec succès une société de gestion de fortune, Adi Herzog, à 55 ans, est revenu à ses premières amours et s’est fait embaucher dans un atelier zurichois spécialiste de la marque Porsche. Pendant ses deux années de formation au métier de mécanicien, il a appris non seulement les subtilités de l’entretien et de la restauration, mais s’est aussi préparé à réaliser un autre grand rêve : participer, une fois dans sa vie, au Trophée Paris-Pékin au volant de sa propre Porsche 356. «
13 000 km en un mois. À travers la Chine, le désert de Gobi, la Mongolie, la Sibérie… Cette expérience a changé ma vie. » Adi Herzog traverse le garage jusqu’à la Porsche 356 argentée dont l’aspect extérieur ne laisse plus rien deviner de ce tour de force. « Je reste tout épaté par la fiabilité de cette voiture. Hormis quelques petits problèmes de sable dans l’embrayage, nous avons roulé sans souci de Pékin à Paris alors que d’autres passaient leurs nuits à rafistoler. » Une fiabilité proverbiale et un minimalisme fonctionnel qui aujourd’hui encore enthousiasment le collectionneur et l’incitent à vivre sa passion pour Porsche sous des formes sans cesse renouvelées.
Réaliser
Un jour, bien sûr, la place a fini par manquer. Et l’idée d’antan a refait surface : un garage chauffé où abriter ses Porsche. Avec suffisamment d’espace pour au moins six voitures — et un pont élévateur. Plus trois pièces d’habitation : un salon, une chambre, un bureau. Les besoins d’Adi Herzog s’arrêtaient là. Il s’adressa à différents architectes, sollicita des projets. Finalement, le bureau zurichois Unger & Treina sut le convaincre avec un concept de bâtiment en deux parties : au sous-sol, la zone d’entrée, avec un généreux garage, et bien au-dessus, trois cubes d’habitation empilés comme des boîtes, dominant le panorama. Les deux parties sont reliées par un ascenseur qui en constitue l’épine dorsale. « L’idée m’a d’abord semblé trop radicale », se souvient le maître d’ouvrage. « Mais un ami m’a convaincu en me disant : c’est ta maison ! »
En dépit de son inspiration minimaliste, la réalisation du projet, d’une grande complexité topographique et statique, a représenté une gageure. Il a fallu excaver la montagne, stocker ailleurs la terre pendant les travaux, couler la partie porteuse puis recouvrir de nouveau le tout.
Arrivée
Mais en 2009, au bout de deux ans de travaux, la maison de rêve d’Adi Herzog était fin prête. À elle seule, l’arrivée est une aventure : la grande porte du garage coulisse sur le côté et laisse entrevoir six Porsche 356 et 911, dont les carrosseries aux courbes sensuelles et les couleurs éclatantes sont particulièrement mises en valeur dans cet espace de béton brut. Un tunnel asymétrique, qui n’est pas sans rappeler un bunker, donne accès à l’ascenseur qui s’élève vers les étages supérieurs baignés de lumière. Les niveaux empilés dans des directions différentes communiquent avec fluidité. Tout est axé sur les baies vitrées qui occupent tout un pan de mur, et dont chacune est tournée vers un point cardinal différent : elles encadrent le paysage du lac et des montagnes qu’elles transforment en monumentales toiles de maître.
De la chambre, on aperçoit le Rigi dans le soleil du matin ; l’après-midi, le salon ouvre la vue sur l’impressionnant panorama en cinémascope du Bürgenstock pointant vers le ciel par-dessus le lac.
Selon l’heure et la course du soleil, l’atmosphère change à l’intérieur de la maison. Des atriums et des puits de lumière répandent une luminosité diffuse ou mettent en scène un jeu contrasté d’ombres et de lumières, tandis que les soirs d’été, de l’autre côté du lac, les parois rocheuses brûlantes du couchant offrent un spectacle inoubliable, par exemple depuis la piscine extérieure. Réaliser de grandes choses avec des moyens simples : telle est la philosophie d’Adi Herzog, et pas seulement pour ses Porsche, puisqu’elle a aussi inspiré la construction de sa maison minimaliste. Tout, dans son plan, est conçu pour laisser le maximum d’espace à l’expérience sensorielle des habitants, comme dans un temple zen, sans chercher à concurrencer les puissances de la nature dont le spectacle se joue face aux fenêtres panoramiques. Le maître d’ouvrage, lui, a parachevé cette composition magistrale par de subtils détails.
Le béton brut, par exemple, a été retraité pour paraître encore plus lisse et brillant. Le wengé chaleureux et le basalte sombre forment un contraste raffiné. Quant à la bande-son, elle n’est pas assurée par un moteur Boxer à refroidissement à air, mais par un système surround perfectionné.
Les meubles aussi ont été choisis pour leur côté sobre et intemporel, et associés çà et là à une œuvre d’art contemporaine. Il n’y a que dans la cuisine qu’Adi Herzog a voulu rompre la rigueur audacieuse de la composition : à côté de l’évier se trouve un ancien pistolet à essence, l’horloge analogique de la cuisine provient d’une voiture de course, et la table, éclairée par des lampes de bateau, était dans une vie antérieure l’aile d’un McDonnell Douglas DC-10. Mécanicien et restaurateur par passion, Herzog n’a pas pu résister à l’esthétique industrielle du XXe siècle, avec ses boulons, ses vis et son acier poli.
Admirer
Alors, tout à coup, la couverture nuageuse se déchire, et comme dans Vertigo de Hitchcock, on est pris de vertige face au fabuleux panorama alpin, d’une profondeur irréelle, qui se révèle. « Avant, avec mes Porsche, je prenais souvent les routes des cols », dit Adi Herzog en regardant de l’autre côté du lac, là où les lacets qui mènent au Saint-Gothard, à la Furka, au Susten et au Nufenen promettent autant de bonheur que les fans de virages peuvent en rêver. « Mais depuis que j’ai cette maison, j’admire surtout les Alpes d’ici. » Quand un conducteur de Porsche ne va pas lui-même en montagne, il faut que les montagnes viennent à lui.
Avec ses Porsche 356, ses 911 iconiques à refroidissement à air et un Cayman GTS, la collection d’Adi Herzog est en fait déjà au complet. Pourtant, bientôt, il fera de la place pour un autre sportif d’exception : le nouveau Porsche Taycan, qu’il a déjà commandé. Une installation photovoltaïque adaptée est aussi en préparation pour sa maison d’avant-garde. Le vieux rêve du garage chauffé, on peut toujours lui apporter encore quelques améliorations.
Info
Texte publié pour la première fois dans le magazine Porsche Christophorus, n° 395.
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