Connaître ses classiques

D’abord parce que ce dernier est un authentique passionné qui collectionne non seulement les voitures (356 C, 911 2.0 de 1965, 911 (997) Speedster, 911 (992) S/T…) mais également les objets et livres se rapportant à la marque. Une passion qu’il vit aussi derrière le volant avec de nombreuses participations au Tour Auto, au Mans Classic ou au BPR Revival. Ensuite parce que sa voiture, la 911 type 964 RS, est un mythe : une seule année de production (d’où son surnom RS 92), 2 280 exemplaires produits et toute l’essence de l’esprit RS (caisse allégée, puissance augmentée, châssis abaissé…). « Fin 2023, ce client a commencé à nous parler de sa volonté de se séparer de sa voiture. On l’a reçue, on l’a expertisée, puis on a fini par la lui racheter. Début 2024, on a décidé de participer au concours avec. Voilà comment la Belle Histoire a démarré », se souvient Cyrille.

L’histoire de cette restauration est aussi belle à travers sa dimension humaine et collaborative. Un projet d’une telle ampleur mobilise tous les services d’un Centre Porsche, de l’atelier au marketing en passant par la direction. Il se crée alors une émulation, une dynamique collective portée par l’ambition de faire vivre le patrimoine de la marque. À Vélizy, les « anciennes » tiennent une place de choix. Ce fut, en 2011, le premier Centre Porsche au monde à décrocher le label « Classic Partner » qui valide un ensemble de compétences dans le domaine. Wilfried Sebaï, Responsable du Département Classic, n’a pas abordé le projet de restauration de la 911 (964) RS différemment de celui d’un client. « On commence par essayer la voiture puis on la met sur un pont élévateur afin de contrôler l’ensemble des éléments. Pour voir si des pièces ont été remplacées, il suffit de regarder les dates de fonderie sur les trains et les pièces. On s’est vite aperçu que, malgré son faible kilométrage, c’est une voiture qui avait tapé fort et avait été mal réparée », précise-t-il. Un constat qui a donné un sens supplémentaire à ce défi : une Porsche est conçue, à l’origine, pour rouler longtemps (une 911 de… 370 000 km a ainsi participé au concours), mais il faut pour cela qu’elle soit entretenue dans les règles de l’art. Ça n’était pas le cas de la RS 92, un « faux pas » qu’il était temps de réparer.

Une restauration totale, c’est un projet d’équipe avec une logique d’exécution et un planning à respecter. Wilfried en est le chef d’orchestre et il connaît parfaitement la musique. Si la plupart des interventions sont réalisées directement sur place, certaines opérations bien spécifiques sont confiées à des partenaires de confiance. Là encore, l’humain est essentiel : « On travaille par exemple avec quatre selliers en fonction de ce dont on a besoin – assise, capote… Pour la 911 type 964 RS, on a, pour la première fois, fait appel à un spécialiste de la cryogénie afin de rénover la visserie d’origine », détaille-t-il. Car, dans le cahier des charges que s’était fixé le Centre Porsche Vélizy, le respect de la configuration d’origine faisait partie des priorités. Plutôt que de remplacer les pièces, il a été décidé de les nettoyer une par une par cryogénie, c’est-à-dire via la projection d’un mélange d’air comprimé et de glace carbonique ! Pour des pièces plus courantes, la maison mère dispose d’un catalogue de 80 000 références et en réédite environ 300 chaque année afin de répondre aux besoins des restaurations.

Une histoire n’est belle que si elle est partagée. Chaque étape de la restauration a ainsi été photographiée et filmée pour être partagée à la large communauté Porsche, très active sur les réseaux sociaux. C’est ainsi qu’elle a pu suivre, pas à pas, le travail de Wilfried et de Bastien Pigot, technicien spécialisé Classic, sur la partie mécanique, entièrement démontée, rénovée puis remontée dans les règles de l’art, toujours en s’astreignant à rester fidèle aux pièces d’origine. Christophe Da Silva, Responsable Carrosserie, et Alain Dubois, peintre, se sont quant à eux chargés du travail titanesque sur la caisse. Restait l’étape ô combien délicate de la mise en couleur. Défi encore rehaussé par la teinte noire de la 911 type 964 RS, la plus difficile à travailler, la moindre imperfection sautant immédiatement aux yeux. De l’avis du jury, la mise en peinture effectuée par l’équipe de Vélizy n’avait rien à envier à une peinture réalisée en usine.

La restauration complète de cette 911 (964) RS a représenté un projet d’ampleur pour le Centre Porsche. Il aura fallu dégager du temps, sans perturber le fonctionnement normal du Département Classic. Et les équipes n’ont pas ménagé leurs efforts, la passion les menant bien souvent à dépasser les heures de travail d’une journée normale... Au bout du compte, 144 heures ont été nécessaires à la mécanique, 410 heures à la carrosserie et 150 à la peinture. Soit un total de 704 heures de main-d’œuvre ! Un chiffre qui ne tient pas compte de l’investissement des équipes du marketing, de la communication et de la direction pour mener à bien ce projet collaboratif. C’est l’ensemble de ces éléments, mis au service de la restauration d’un modèle de légende, qui a séduit le jury parmi les projets des dix Centres Service Porsche engagés dans la compétition. 

Enfin, une belle histoire ne l’est vraiment que si elle se transmet. La restauration de la 911 type 964 RS a été l’occasion de donner un coup de projecteur sur ces métiers de l’ombre qui entretiennent le patrimoine de la marque. Les visiteurs passés par le dernier salon Rétromobile ont ainsi pu admirer la caisse nue de la RS 92, alors en pleine restauration. Aller à la rencontre du public, et en particulier des jeunes, pour éventuellement susciter des vocations, c’est aussi l’un des objectifs de ce concours. Car la transmission des compétences et de la passion reste le meilleur moyen pour que le passé ait de l’avenir. 

Pour Porsche France, ce Concours de Restauration Classic est la plus belle façon de promouvoir le savoir-faire du réseau. « Les Centres Service Porsche restent le meilleur endroit pour réaliser une restauration, complète ou partielle, ou tout simplement entretenir sa classique », rappelle Laura. Cela permet également de faire vivre un héritage qui n’a pas vocation à finir dans un musée. Il n’y a d’ailleurs pas de belle histoire sans épilogue. Celui de la 911 type 964 RS de Vélizy est de reprendre la route, dans un premier temps pour aller à la rencontre du public, à l’occasion de divers événements, afin de créer du lien autour de la passion de la marque. Puis le Centre Porsche Vélizy devrait s’en séparer. Il se dit que son propriétaire initial pourrait la racheter. Ce ne serait alors pas la fin d’une histoire… mais le début d’une autre. 

La Sportomatic du Centre Porsche Montpellier

Gagnante dans la catégorie restauration partielle, la 911 Sportomatic a, conformément à la thématique du concours, une « Belle Histoire ». C’est la première sportive de la marque qu’Olivier Daynac, Directeur des Centres Porsche Montpellier et Bastia, ait achetée, il y a de ça 36 années, sans avoir eu l’occasion de la restaurer jusqu’alors. Un modèle symbolique par son histoire, donc, mais aussi par sa technologie. La Sportomatic est équipée d’une boîte mécanique dépourvue d’embrayage, une innovation majeure lorsqu’elle apparaît en 1968. Pour l’équipe de Montpellier, c’était aussi un défi de démonter, pour la première fois, cet élément mécanique si particulier pour la restauration, avec toujours la volonté de respecter scrupuleusement la configuration d’origine. Pas moins de 200 heures ont été consacrées à la rénovation de la boîte et du moteur. Un travail récompensé par le titre « Restauration Partielle » décerné par les experts du jury… après avoir remporté l’édition précédente dans la catégorie Restauration Totale.